16 décembre 2012

Cap-Vert, Iles Sotavento, Sous le Vent

Santiago
Le 7 novembre, nous avons quitté Mindelo pour Santiago, avec le courant et en pêchant une énorme coryphène à la sortie de la baie. Nous la laissons traîner pour la fatiguer car c'est un monstre difficile à remonter dans le bateau, mais elle se détache. Sal Rei, le bateau de transport de passagers et marchandises qui fait Mindelo Praia nous dépasse, puis nous ne croisons plus personne. Le bateau avance bien dans cette navigation au bon plein et avec sa carène lisse, à 6 bons noeuds de moyenne.
Les cap-verdiens nous avaient déconseillé d'aller à Praia, la capitale ou les agressions sont quotidiennes. Tarrafal, dans le Nord-Ouest de l'île, est par contre tranquille. Le mouillage tient bien, la petite ville en bord de plage est agréable, on y trouve tout l'avitaillement nécessaire et les transports pour visiter l'île. Les pêcheurs remontent leurs barques sur la plage, et vendent le poisson le matin, qui sera revendu dans l'intérieur de l'île. Il y a quelques voiliers et des bateaux de pêche au mouillage. Nous demandons à notre voisin le pêcheur s'il a un petit poisson pour appât et pour pouvoir pêcher à la ligne (palangrotte) du bateau. Il nous dit que dès qu'il en aura, il viendra nous en donner. Deux jours plus tard, il passe nous déposer un seau plein de sardines dans l'annexe! Distribution pour les autres voiliers et conserves...
 De Tarrafal, nous tentons une balade dans la Serra Malagueta, qui est malheureusement souvent dans les nuages. Mais ce jour-là est pire que les autres, et on ne voit pas à 5 mètres. Nous rebroussons chemin pour filer au marché d'Assomada, dans le centre de l'île, où les cultivateurs, éleveurs, vendeuses de vêtements viennent des quatre coins de l'île vendre leur productions. Le marché est encore plus animé le samedi et le mercredi, les rues de la ville sont vivantes, les étalages remplis, et les potins de Santiago vont bon train...Santiago est l'île africaine du Cap Vert. La musique (Funana) y est plus rythmée, les femmes portent souvent le pagne, les plats se rapprochent du Tiboudiep.













Santiago est en général plus couverte que les îles du Nord, et il semble que ce soit le cas aussi des autres îles sous le vent, Fogo et Brava. Mais depuis notre arrivée au Cap-Vert à la fin de l'été local, le climat change sensiblement, la température fraîchit de quelques degrés, ce qui n'est pas désagréable.

Nous partons visiter le sud de l'île de Sao Domingo à Sao Jorge do Orgaso en passant par Rui Vaz. On redescend du village de Rui Vaz, en altitude, par une vallée fertile à la végétation dense et diversifiée,  eucalyptus, manguiers, maïs, canne à sucre, haricots, maraichage....
 
 







Brava
Le 17 novembre, nous quittons Tarrafal pour Fogo à 3 heures du matin, de manière à arriver de jour. Nous arrivons en fin d'après-midi mais le port est en travaux. Deux grandes barges prennent la place où les voiliers mouillent habituellement, l'ancre dans le port et un bout tiré sur la plage, amarré à un gros rocher. Nous tentons de nous mettre à couple d'un remorqueur pour la nuit car les quais du port sont trop hauts et en mauvais état. Celui-ci refuse et nous restons finalement la nuit au mouillage en évitant dans l'entrée du port, où la houle entre malgré tout un peu, cassant sur les roches de la rive. Le matin à 8h, nous sommes à peine levés qu'un cap-verdien s'approche de notre bateau à la nage. Il nous dit qu'il faut aller voir la police, comme dans toute les îles du Cap Vert, nous devons nous présenter à la police maritime avec les papiers et payer 700 escudos (environ 7 euros). Mais notre annexe sèche après réparation et nous n'avons pas l'intention d'aller à la police alors que nous n'allons de toute manière pas rester. Celui-ci nous demande un café ou à manger pour l'information qu'il nous transmise (que nous connaissions déjà). Nous refusons, il demande un rhum, de l'argent.... Nous nous apercevons qu'il a les yeux injectés de sang et l'arcade à moitié ouverte. Il refuse de quitter le bateau. Nous appelons un zodiac qui passe pour débarquer les passagers d'un ferry de croisière. Il commence à s'éloigner à la nage. Puis revient. Nous faisons mine d'appeler la police avec la VHF (radio du bateau). Il regagne finalement le port en se cachant. Le port de Fogo est isolé, distant de la ville de Sao Felipe d'environ 5 kilomètres. Nous décidons de larguer rapidement les amarres et de rejoindre Brava. Nous apprenons quelques temps plus tard qu'une semaine après nous, un voilier s'est fait attaqué, les trois personnes à bord ligotés, le bateau pillé, la femme violée...

Le vent s'engouffre fortement dans le canal entre les deux îles, par rafales et on réduit les voiles. Les vagues de la houle croisent celles qui vont rebondir sur les deux îles.
Le port de Furna à Brava est petit. Les pêcheurs nous aident à mouiller, ancre face à la mer et deux bouts sur la rive amarrés aux rochers (environ 40 mètres de bout). De cette manière, la bateau n'évite pas et on peut accueillir dans le port plusieurs voiliers, sans gêner les pêcheurs et le ferry et le bateau est plus stable, face à la houle.

La vie à Furna est paisible. Les gens sont très accessibles, et, curieux, aiment à échanger quelques mots. Tous les jours, la jetée est pleine de pêcheurs, qui remplissent un seau de petits poissons à frire, juste avec une canne, un hameçon et un petit plomb. Le port est plein de poissons de différentes tailles, esmoragal (très bon poisson), poissons trompettes, langoustes, murènes, petits poissons...Les pêcheurs qui ont des barques vont aussi le matin prendre ces petits poissons pour pêcher plus gros en mer.

Albert nous accueille sur le quai. Deux jours après notre arrivée, il nous appelle au bateau, un sac à la main avec 6 langoustes vivantes. Cadeau de bienvenu! 


L'île de Brava est surnommée l'île aux Fleurs. Elle est très verte et c'est aussi l'île la plus fraîche de l'archipel. Comme à Fogo, les liens avec les Etats-Unis sont assez présents et les locaux parlent bien anglais. L'histoire remontent aux baleiniers qui, faisant escale à Fogo et Brava, avaient embarqués des cap-verdiens à bord, reconnaissant leur habilité pour la pêche. Les conditions de vie étant très dures sur ces bateaux, des cap-verdiens auraient débarqué aux Etats-Unis, certains sont rentrés, d'autres sont restés, entretenant un lien avec leur terre originelle sur plusieurs générations.
Les hauts de l'île sont dans les nuages. Dans la ville de Villa Nova Sintra, considérée comme une des plus belles du Cap Vert, chaque maison à son jardin et ses fleurs.

Sur la côte ouest de l'île, on trouve un autre village de pêcheur, Faja de Agua où on peut aussi mouiller par petit temps.
 

De Villa Nova, la vue sur Fogo est magnifique.
Fogo
Vu les conditions d'accueil à Fogo, nous préférons laisser le bateau à Brava où la sécurité ne pose pas de problèmes et le ferry rapide nous mène à Fogo pour 30 euros l'aller-retour. 
La ville de Sao Felipe est belle, avec ses vues sur Brava, ses ruelles pavées et ses grandes maisons à patio. Tôt le matin, les gens des autres villages Fogo viennent à Sao Felipe, au marché, vendre leurs légumes, acheter des provisions pour leur commerce ou leur maison, puis à 11h, les aluguers repartent pour les quatre coins de l'île et Sao Felipe redevient calme. Dans le seul aluguer qui va au volcan, on remplit des caisses d'approvisionnement, on tasse on tasse, un enfant sur chaque paire de genoux, et en route, le minibus grimpe jusqu'au haut de l'île, dans le cratère, au village de Cha das Caldeiras.

Dans le cratère, le paysage est lunaire. Plusieurs pics pointent dans la caldera, et correspondent à des éruptions et poussées de lave anciennes. La dernière éruption s'est produite en 1995. La population habitant dans la caldera a été évacuée et une partie du village et des cultures ensevelies sous la lave. Le grand Pico est ancien mais à l'intérieur de son cratère, on observe des fumeroles. Certains endroits sur le Petit Pico, le dernier sorti de terre, sont chauds.

grand pico






petit pico
L'atmosphère est particulière dans la caldera le soir, les lumières, le silence. On se lève à 5h du matin pour pour monter le grand Pico. Il faut prendre un guide car le sentier n'est pas bien clair (malgré les nombreux randonneurs qui montent le volcan). Nous partageons le forfait du guide à quatre, ce qui revient à 1000 escudos chacun. Nous commençons à marcher dans l'obscurité, puis au début de la montée, le jour pointe. L'ombre du volcan se dessine sur la falaise de la caldera.
ombre du volcan avec nuage
vue de la caldera et de la mer depuis le haut du grand pico

 





 




La montée se fait dans les cailloux. En haut du volcan il fait frais. On voit des fumées sortir par endroits. 
La descente du volcan est très drôle. On dévale la pente dans le sable noir comme avec des bottes de sept lieues. On vole sans effort en admirant la vue.

Et le soir, chez Ramiro, bar épicerie et coopérative vinicole, un groupe de coladeira joue ses airs entraînants. On y goûte le manecom, vin cuit de la caldera, ou le vin blanc, très fruité.
Dans la caldera, on cultive la vigne depuis qu'un français aristocrate du nom de Montrond était venu s'y installer au XIXe siècle, à priori en fuite. Presque tout le village aujourd'hui s'appelle Montrond. On y cultive encore un peu de mais, des haricots, des grenades, du café, des figues, des coings. Les habitants de la Caldera sont très attachés à leur volcan. Même si les risques d'une nouvelle éruption restent, ceux-ci ne quitteront pas cette terre à première vue hostile mais en fait très fertile. 
Nous redescendons à pied de Cha das Caldeiras jusque Mosteiros les 1600 mètres de dénivelés pour rejoindre la mer. Les nuages se sont accrochés au versant au vent de Fogo et nous marchons dans la forêt sous la pluie. La vue se dégage à 400 mètres d'altitude au-dessus de la mer environ. 

Retour aux îles aux Vents
Nous quittons Brava le 1er décembre. A la police, on nous confirme qu'on ne peut faire sa sortie du territoire à Brava. Il faut retourner à Praia, Mindelo ou Sal pour faire tamponner les passeports au moment de quitter le Cap-Vert. Certains bateaux font quand même tamponner les passeports avant de passer par Brava. La police maritime ne semble en effet pas vraiment contrôler les pages des visas. Il suffit donc d'y faire ses papiers pour le bateau comme dans chaque île. Il manquera cependant la vrai clearance de sortie du territoire du Cap Vert, qui peut être demandée l'autre côté...Nous avons décidé de retourner à Mindelo faire la sortie et nous devons aussi rencontrer Tigara. Nous attendons une fenêtre où les vents sont un peu plus Est. Et nous serrons le vent au maximum après avoir passé la marmite du canal de Fogo-Brava. Au bout d'un certain temps, nous faisons toujours cap sur Tarrafal de Sao Nicolao...! Bien sûr, l'envie de retourner saluer nos amis pêcheurs ne se refuse plus.

Sao Nicolao
Nous retrouvons tout de suite Francili, qui vient nous voir au bateau. Et nous retrouvons aussi le sangria vert Bande à Part, que nous avions déjà rencontré en Galice et Mindelo. A leur bord, les pêcheurs nous cuisinent une délicieuse soupe de crabes très gourmande. C'est le début de la saison des crustacés, crabes, langoustes. On part tous ensemble faire une marche dans la montagne avec Francili, depuis Faja en repassant par Fragata et jusque Praia Branca

Et puis une partie de pêche sur le quai du port, avec des bouts de maquereaux comme appât. Au bout de quelques temps où certains ont déjà eu de belles touches qui se détachent, Zidane tire le fil rapidement, en l'enroulant autour des avant-bras, aidés de trois autres. Il tire, laisse filer le poisson, le retire, tente de le fatiguer. Et c'est au crochet qu'ils sortent la bête dans une barque, une énorme raie manta d'environ 90 kg.

 Santa Lucia
Ils ne nous restent que deux jours pour Santa Lucia. C'est court pour profiter du calme de cette île presque déserte. Seuls quelques pêcheurs y viennent à la voile, Ils restent quelques jours pêcher, et dorment dans des campements sur la plage. Celle-ci est magnifique et l'eau est transparente. A peine la ligne dans l'eau, les poissons mordent.
baliste
Mindelo
De retour à Mindelo, nous avons retrouvé Tigara. Les voiliers sont nombreux et chaque jour un d'eux part en traversée. Nous avons fait la sortie du territoire, l'approvisionnement, préparé le bateau, prêt à partir... Mais Sylvain apprend qu'il doit rentrer vite pour des problèmes de santé dans sa famille. Il rentre 3 semaines et je reste à bord garder le bateau. Prochain essai mi-janvier.
Bonnes fêtes à tous!